Diagnostic de la NOHL : sensibiliser le public à la souffrance invisible des patients

LHON Main
Ouvrir-Les-Yeux

Maryse Roger a vécu de près la neuropathie optique héréditaire de Leber (NOHL). Elle a d’abord aidé ses deux frères lorsque leur vue s’est détériorée, puis elle a supervisé les soins prodigués à son fils lorsque la maladie a également été diagnostiquée chez lui. Maryse a deux frères. Son frère cadet, décédé tragiquement dans un accident l’an dernier, n’a commencé à présenter des signes de NOHL qu’à 21 ans alors que chez l’aîné, la maladie s’est déclenchée beaucoup plus tôt. Actuellement présidente d’une association de patients atteints de NOHL, Maryse a accepté d’évoquer pour Pharmaforum les diagnostics de ses frères et de son fils, l’impact que la maladie a eu sur sa famille, l’évolution de la compréhension qu’ont les médecins de la NHOL et en quoi l’association « Ouvrir Les Yeux » peut faire la différence. Surmonter le choc du diagnostic de la NOHL Lorsque son frère David a commencé à souffrir de la NOHL, il n’avait que 10 ans. Le choc a été terrible pour les parents de Maryse. Ils ne savaient rien de cette maladie et du terrible risque de cécité qui lui est associé. Ils ont donc dû tout apprendre. David a été pris en charge par le centre hospitalier universitaire de Lille, ce qui a considérablement facilité le processus. Le centre s’intéresse depuis plusieurs années à la NOHL et traite un nombre relativement élevé de patients. Le diagnostic a donc été posé plus vite que d’habitude. Un traitement initial à la cortisone a été mis en place, qui n’a malheureusement pas permis d’améliorer la situation. Le frère de Maryse a néanmoins réussi à poursuivre sa scolarité. Il a d’abord intégré une école spécialisée à environ 40 km de chez lui, puis est revenu dans le système éducatif ordinaire. « Mon frère a eu le courage d’aller au collège et de faire des études supérieures », explique Maryse. « L’adaptation des documents dépendait du bon vouloir des enseignants. Certains d’entre eux étaient vraiment formidables, mais d’autres ne prenaient pas la peine de modifier leur enseignement. Heureusement, les élèves étaient solidaires ». « À cette époque, il n’existait aucune association de patients comme ‘Ouvrir Les Yeux’ », souligne-t-elle. Lorsque Gilles, le frère cadet de Maryse, a été frappé par la maladie à 21 ans, il travaillait en tant que représentant de commerce itinérant. Atteint de NOHL, il était hors de question de conduire. Il a donc dû démissionner de son poste. Malgré tout, il a continué à travailler et a même créé sa propre société. Il a investi beaucoup de temps et d’efforts pour aider les personnes atteintes de handicaps. Le fils de Maryse, lui, a été diagnostiqué à l’âge de huit ans. À cette époque, l’un de ses yeux était déjà atteint sans que ses parents ou lui-même ne s’en aperçoivent, et il avait déjà perdu une grande partie de la vision au niveau de son autre œil. « Nous étions sur le qui‑vive », assure Maryse. « Nous savions que la maladie planait au-dessus de nos têtes. Lorsqu’il n’a plus été en mesure de lire un prix sur une étiquette, j’ai eu tellement peur que dès le lendemain, nous sommes allés en urgence chez l’ophtalmologue. La perte de vision centrale a alors été confirmée ». Chaque diagnostic a été source d’angoisse pour Maryse et sa famille. Il a fallu s’adapter au handicap de son fils et de ses frères. Dans le même temps, tout le monde s’est interrogé sur ce qu’ils deviendraient au plan personnel et professionnel, et quels loisirs ils pourraient encore avoir. « Mon frère David a continué à jouer au football – la capacité d’adaptation des enfants est incroyable. Il a aussi continué à fréquenter les clubs de jeunes du village, même s’il n’allait plus à l’école avec ses anciens copains », poursuit Maryse. « Il a fait preuve d’un courage extrême lorsqu’il a intégré un collège spécialisé, puis s’est lancé dans des études ». Elle ajoute cependant : « Lorsque notre famille a fait connaissance avec la neuropathie optique héréditaire de Leber, nous avons tous ressenti cela comme une menace pesant sur nous. Une épée de Damoclès. Quatre ans après mon fils, ce fût mon tour d’être atteinte par la maladie ». Pour suivre l’éducation de son frère, la mère de Maryse avait appris le braille. Maryse se souvient qu’enfant, elle était témoin des difficultés éprouvées par sa mère lorsqu’il fallait remplir les formalités administratives concernant le handicap de son frère. « Ma mère est décédée quatre ans après l’apparition de la maladie chez mon frère, j’ai donc pris sa suite et j’ai fait de mon mieux pour soutenir mon père et mes frères ». De ce fait, Maryse a dû renoncer à son désir d’être journaliste. Elle a fait des études moins onéreuses lui permettant de continuer à aider sa famille. Un diplôme d’enseignante se révéla être la solution raisonnable au problème et, par bonheur, elle adorait cette profession. Améliorer le diagnostic et le traitement de la NOHL Outre le fait que des associations de patients atteints de NOHL comme « Ouvrir Les Yeux » ont été créées, Maryse estime que la compréhension qu’ont les médecins de la NOHL a considérablement évolué, même si des progrès restent à faire au niveau scientifique. « À l’heure actuelle, les médecins ne savent toujours pas pourquoi certaines personnes sont atteintes de NOHL et d’autres pas. Lorsque la maladie est méconnue dans une famille, les patients qui ne se rendent pas directement dans un centre dédié aux maladies rares passent souvent de spécialiste en spécialiste, et il peut s’écouler une longue période de temps avant que le diagnostic ne soit établi. On confond souvent la NOHL avec d’autres maladies et le patient peut même s’entendre dire que ce qui lui arrive est psychologique. Nous savons à présent que la mère transmet la maladie à ses enfants et que les filles peuvent également être touchées ». Plusieurs centres spécialisés en France s’efforcent d’améliorer le diagnostic et le traitement de la NOHL. Ils sont regroupés au sein d’OPHTARA, une agence de la filière SENGSENE avec laquelle « Ouvrir Les Yeux » a un partenariat. Mais l’accès aux essais cliniques pour cette maladie rare est à la traîne. Lorsque le frère et le fils de Maryse ont été diagnostiqués, aucune étude n’était disponible. Le plus gros problème en ce qui concerne la NOHL, selon Maryse, c’est de trouver des financements pour soutenir la recherche en vue de trouver un traitement capable de prévenir la maladie et, au final, guérir celle-ci. Combattre la souffrance invisible due à la NOHL Un handicap invisible tel que la neuropathie optique héréditaire de Leber s’accompagne malheureusement d’une grande souffrance, elle aussi invisible. Après avoir assisté à l’assemblée générale de l’association « Ouvrir Les Yeux » pour la première fois en 2006, Maryse a décidé de s’investir dans cette association afin de réduire l’isolement social que peut provoquer une déficience visuelle. Pour comprendre un handicap, le grand public et les médecins doivent savoir comment approcher les patients atteints d’une maladie rare comme la NOHL et comment communiquer efficacement avec eux. Maryse estime que les personnels de santé et les travailleurs sociaux devraient échanger davantage entre eux et fournir des conseils personnalisés sur des questions telles que l’inclusion scolaire, les effets d’une cécité soudaine ou la façon de conserver son emploi lorsqu’on est atteint d’une pathologie comme la NOHL. Dans le cadre de son action en faveur des patients et de leurs familles, l’association « Ouvrir Les Yeux » organise chaque année une rencontre nationale ainsi que d’autres manifestations régionales destinées aux médecins et chercheurs. L’association aide également ses membres en les mettant en contact les uns avec les autres grâce à une téléconférence mensuelle organisée par un psychologue bénévole. Ils peuvent ainsi partager plus facilement leur expérience et se sentir moins seuls. Faire connaître la NOHL Maryse est d’avis que les professionnels de santé, les patients, leurs familles et le public sont de plus en plus sensibilisés au problème de la cécité, ce qui permet d’améliorer les options en matière d’éducation et d’autres milieux communautaires. Cependant, il y a encore du chemin à parcourir pour faire connaître la NOHL et les maladies rares en général. Pour en savoir plus sur la NOHL, jetez un coup d’œil à l’infographie récemment créée par Santhera (en anglais) ou accédez à notre rubrique Spotlight (en anglais également). Maryse RogerÀ propos de Maryse Roger : Maryse Roger participe à des actions menées par l’association « Ouvrir Les Yeux » depuis 2006, association dont elle a eu l’honneur d’être élue présidente en 2012. En tant que personne touchée par la neuropathie optique héréditaire de Leber à plusieurs niveaux, elle travaille avec les membres du conseil d’administration, les bénévoles et les chargés de communication de l’association afin de venir en aide aux personnes concernées par cette pathologie. Elle s’attache également à promouvoir la recherche scientifique, l’information du public à propos de la NOHL et, plus généralement, la sensibilisation aux handicaps visuels et à leur impact.